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Edition et autoédition : sommes-nous si différents ?

On a trop souvent tendance à répartir les auteurs autoédités en deux catégories : ceux qui cherchent un éditeur (et choisissent l’autoédition par défaut) et ceux qui se publient en opposition à l’édition traditionnelle.

J’en discutais avec un auteur il y a quelques jours : les métiers de l’édition me font de l’œil depuis longtemps, et peut-être passerai-je le cap un jour. Pourtant, une crainte me retient : ne serait-ce pas « trahir » l’autoédition ? Et « trahir » mes valeurs de vie : n’être jamais ni l’inférieur ni le supérieur de quelqu’un ?

Tout dépend de quelle manière on aborde l’édition. Si la relation auteur/éditeur se fait rapport de force, ce n’est pas la peine. Si l’auteur doit y perdre sa liberté, aucun intérêt. Mais si on envisage cette relation comme une collaboration et un échange de compétences, cela devient intéressant. Dans les faits, l’auteur doit être non pas choyé (ce n’est pas un enfant) mais respecté, consulté, tenu au courant des différentes étapes de publication de son livre. Inversement, l’éditeur doit être respecté dans son travail, sans avoir à subir les foudres d’un auteur qui l’aurait érigé au rang de dieu pour le descendre de son piédestal à la première contrariété. J’avais eu ainsi une discussion avec une jeune éditrice qui ronchonnait contre ses auteurs, très exigeants, intraitables, ne comprenant pas et ne souhaitant pas comprendre tout le travail d’édition qu’il y avait autour de leur livre.

En vérité, les auteurs indépendants sont déjà des éditeurs. C’est une casquette que nous portons bon gré mal gré dès lors que nous décidons de nous publier. Que nous fassions tout nous-mêmes et que nous le confions à des prestataires, nous gérons correction, mise en page, graphisme, impression, publication, diffusion-distribution, promotion de notre livre. En somme, de la même manière qu’un éditeur. D’ailleurs, certains éditeurs ont créé leur maison d’édition dans le but premier de publier leurs propres livres.

De ce fait, je ne pense pas qu’auteurs indépendants et éditeurs soient véritablement opposables. Par ailleurs, les éditeurs indépendants rencontrent des difficultés similaires aux nôtres, notamment sur la question épineuse de la diffusion-distribution. De nombreux petits éditeurs se chargent eux-mêmes de diffuser et distribuer leur catalogue, afin de limiter les intermédiaires.

L’un des arguments de l’autoédition, c’est ce que l’auteur gagne sur chaque exemplaire vendu. Mais pourquoi gagne-t-on davantage sur un exemplaire autoédité ? Parce qu’il y a moins d’intermédiaires tout simplement. Comment un éditeur peut-il proposer des droits d’auteur supérieurs à 10 ou 15% quand on sait qu’environ 35% du prix du livre HT revient au libraire, 12 à 15% au diffuseur-distributeur, 15 à 20% à l’imprimeur ? Je ne parle même pas de la correction, de la mise en page et du graphisme en amont, et de la promotion quand il reste un budget pour celle-ci.

Je ne cherche pas à retourner ma veste en défendant les éditeurs, mais force est de reconnaître que certains font un travail de grande qualité, et pas seulement les grandes maisons d’édition. On reproche régulièrement à l’édition sa démarche mercantile : tel livre est-il viable commercialement ? Se vendra-t-il ? Autant de questions qui éclipsent la qualité littéraire du texte.

Il serait faux de penser que les éditeurs sont uniquement à la recherche de pépites littéraires. Forcément, ils calculent le potentiel commercial de chaque livre. Toutefois, leur démarche s’explique : quand un livre ne se vend pas, c’est l’éditeur qui doit supporter le coût des invendus, que les libraires se font un plaisir de renvoyer sans autre forme de procès. Il a intérêt à avoir une trésorerie solide, et à ne pas trop s’emballer. Voilà pourquoi pour un premier roman, les petits éditeurs prévoient de faibles tirages, entre 200 et 500 exemplaires.

Ce n’est pas forcément l’édition qui est en cause, mais l’ensemble du système qu’il faudrait repenser. Compliqué dans les faits, pour l’auteur comme pour l’éditeur. Mais il est une réalité indéniable : auteurs indépendants et éditeurs ont tout intérêt à collaborer dans l’avenir. Et à laisser de côté la guerre qui les oppose depuis trop longtemps. En apprenant les uns des autres.

Edit : A ce sujet, je vous rappelle que j’accompagne les auteurs autoédités comme les maisons d’édition en tant que lectrice-correctrice.

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