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Fanny Campan : une auteur véritable

Qu’est-ce qu’un vrai auteur ? La question a de quoi agacer. Est auteur celui qui écrit, point. Pas sa liste de courses, bien sûr. Est auteur celui qui écrit des histoires. Mais que dire alors de ceux qui écrivent des essais ou des livres pratiques ? Ce sont aussi des auteurs… Bref, la question est inepte. Il n’y a pas de vrai ou de faux auteur. Et pourtant, malgré cette conclusion, je ne peux m’empêcher de penser que Fanny Campan est une véritable auteur.

Autant de noms qui ne sont qu’une seule et même plume. Cette plume-là, quel que soit le pseudonyme sous lequel elle publie, cette plume-là, dis-je, (pour reprendre une tournure de phrase qui lui est propre), cette plume-là, maintiens-je, a quelque chose à dire. Déjà, elle écrit bien. Euphémisme. Fanny Campan a un style à elle, peut-être imitable mais qui n’est pas lui-même une imitation. Ce style, on le retrouve dans chacun de ses livres. Le mélange des phrases courtes et percutantes et des longs monologues, presque des mélodies. Le sens du mot qui claque, qui fouette, qui agresse. La capacité à mettre mal à l’aise le lecteur, un malaise indéfinissable qui tient au choix des mots plus qu’à l’action elle-même.

Derrière cette écriture unique, il y a ce qui fait d’elle une véritable auteur : l’obsession. L’auteur poursuit des idées obsessives, un but qui lui est propre. Il ne s’agit pas de plaire au lecteur ni de raconter de jolies histoires qui font plaisir. Il y a une nécessité à écrire certaines choses et à les décortiquer. L’acte d’écrire est autotélique : il est son propre but.

Si je vous parle des livres de Fanny Campan, c’est parce que j’ai eu récemment le privilège de les lire tous. Fanny m’avait en effet confié le soin d’en refaire la mise en page intérieure. J’en avais déjà lu certains, j’en ai découvert d’autres. Et c’est un régal. Alors, je ne résiste pas au plaisir de vous les présenter. Je précise que Fanny est une amie, mais qu’elle ne m’a absolument pas demandé d’écrire cet article.

Fanny Campan maîtrise les textes courts comme les romans longs. C’est ce qu’on constate à la lecture de ce recueil de nouvelles, dans lequel aucune n’est à jeter. On retrouve la nécessité d’écrire dans plusieurs histoires, mais aussi une part non négligeable accordée au sexe. Attention, contenu clairement explicite ! Et si bien écrit… Personnellement, ma nouvelle préférée est Le soleil aveuglé. Et vous ?

Ni Oui, Ninon est une pièce de théâtre courte, en trois actes. Trois amis se réunissent pour l’enterrement d’une amie d’enfance. On en découvre de belles à son sujet ! Et on ne peut que se questionner sur la part d’elle-même qu’a mis l’auteur dans le personnage de Ninon. Dont il est question tout au long de la pièce mais qui n’apparaît jamais, puisqu’elle est décédée. Une sympathique et grinçante pièce de théâtre, dont les codes sont sans conteste maîtrisés. On l’imagine très bien jouée !

Dans Sangs mêlés, Sali, jeune femme noire et orpheline, a décidé de faire la biographie de sa maman blanche, qui l’a recueillie à sa naissance. Au fil des jours et des pages, elle en vient à se découvrir et à se révéler, dans un pays aux coutumes bien sévères et tandis que s’égrène l’histoire incroyable de Klara. Un très beau roman, où intervient régulièrement du wolof. Celui-ci, j’ai eu l’occasion de le corriger dans sa première version, que j’avais adorée. Depuis, Fanny l’a retravaillé, avec une grande justesse.

Gorgi Djiguène est la pièce reliée à Sangs mêlés. Elle vous intéressera donc davantage si vous avez déjà lu le roman, ou bien en préambule de celui-ci. C’est une pièce de théâtre courte et vivante, où on retrouve les personnages du roman : Sali, Pape, Disquette, Klara et Kiné.

(Mal) voyante est plus qu’une autobiographie, c’est une véritable œuvre littéraire. Et dans cette œuvre, il y a plusieurs histoires : celle inventée lors de la bouffée délirante et l’histoire réelle, l’après. C’est un roman fascinant et dérangeant. Tout est fait pour plonger le lecteur dans le malaise, sans que les choses soient dites clairement. L’auteur sait distiller les éléments de l’intrigue… Jusqu’à ce que celle-ci éclate et qu’on reparte à la recherche de la vérité, loin du fantasme. Un livre étonnant, malgré quelques redondances.

Le deuxième roman de Thomas Simon est probablement le livre de Fanny Campan avec lequel j’ai le moins accroché. Déjà, il y a une certaine redondance. Mais surtout, il met très mal à l’aise, sans qu’on comprenne bien pourquoi. Car, en réalité, il ne se passe rien de vraiment terrible. Et pourtant, tout semble prendre un sens malsain sous la plume de l’auteur. Malaisant, inconfortable, c’est ce qui rend précisément ce roman intéressant.

Voici ma chronique sur (Un) fidèle. Je l’ai rédigée il y a quelques années déjà !

Histoire de Bizangos est une novella sur un vieux proviseur qui termine sa carrière à l’étranger. Cerné par les femmes et les papillons bizangos, le voilà qui perd pied. Au lecteur de déterminer ce que sera sa fin !

Bref, vous l’aurez compris, si vous aimez la belle littérature qui a des choses à dire et des tripes pour l’écrire, vous devez découvrir Fanny Campan. A vous de voir quel livre vous tente en premier… Vous y reviendrez, j’en suis certaine ! Sachez aussi que Fanny est romancière chamane et qu’elle aide les autres sur le chemin de l’écriture et de la découverte de soi.

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